168 poèmes reçus, 4 poèmes primés
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Prix Lionel RAY, Prix du Président de l’Université
Ariane JOUSSE pour Sans titre
(étudiante en Master 2 de Littératures françaises à Paris-Sorbonne)
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Prix de l’U.F.R. de Langue française
Stéphanie MOREL pour Sans titre
(étudiante en Licence 3 de Philosophie à Paris-Sorbonne)
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Prix du Service Culturel
Aymeric LE GUILLOU pour Le petit rien
(étudiant en Licence 1 de Lettres Modernes à l’université de Toulouse 1 Capitole)
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Prix de la Francophonie
remis par l’Agence Universitaire de la Francophonie
Silvana Dunat pour Le flacon bleu
(étudiante à l’université de Zadar en Croatie)
Cliquez sur l’image pour consulter la galerie photo de la remise des prix du concours.
Sans titre
Le courage se rassemble ; on tente de composer
un blason, on déplie ce que l’on trouve. On
marche pour une seule heure, vers une robe, un
vent du nord.
On sait maintenant que le feu n’a pas d’intérieur
– qu’il y a visages et voix seulement, et profusion
de langues.
Ton nom, proche de la figue et du seigle.
Depuis la cour Maria Casarès part une ruelle vers le verger
du Palais ; coupée dans la montagne pour tomber presque
en ruines, d’une pierre qui voulait s’écrouler et que la ville
a retenue. De cette histoire que la chaleur fige, on pourrait
faire une prière – elle enchâsserait les vieux rêves de doré,
de lenteur.
A Avignon je pense aux sternes de Loire qui s’espacent
dans une lumière moins violente – viennent tes mains
froides et s’impriment sur ce tissu d’oiseaux. Tu ne sais
pas, j’ai presque mal d’avoir confiance.
Ce tu, avec quelle force grandissante une haute pensée de
toi l’anime et le nourrit – haute mais proche de la terre
chaude, du mouvement des insectes. Renversement de
l’amour dans les rues, les cartes, les jardins.
Sternes de Loire – rose imprécis en contrebas d’un
château, le fleuve était presque sec, on nous mettait en
garde contre les sables mouvants.
Cette image t’éloigne et parle une autre langue. Elle
rappelle qu’on peut vivre, qu’on vivra peut-être mieux.
*
De figue, de seigle est ton nom, et pourtant tes couleurs ont
la violence d’une fin d’été : paille dispersée, vent fort, terre
noire.
Tes mots, ta voix dans tes mots – je pourrais tout réunir
dans l’heure du jour très avancé où blé contre charbon sont
les seuls pôles de clarté ; prêts à renoncer, en lutte encore.
Avignon – avec mon corps et le soir sur le jardin des
Doms, vers les bastides et les monts du Vaucluse, au plus
bas de la pierre tombée.
Ariane JOUSSE
Sans titre
Tu regardes l’horloge. La petite aiguille est sur le 8. Tu te demandes si c’est le matin ou le soir.
Dans tes yeux, une lueur étrangère s’est installée. Un vide obstiné.
Tu vis dans un monde friable. Parfois, tu trouves des petites portes vers celui des tiens.
L’oubli déjà efface les derniers nés de tes petits-enfants. Il y a eu Maxime, et Arthur. Il y aura Charlotte.
Tu vis chez toi comme une invitée. Il y a cette valise au premier, où est rangé tout ce que tu ne retrouves pas. Quel hôte t’invite donc dans ta propre maison ?
Huit heures. Matin ou soir ? Tu n’as plus qu’à poser la question. Tu demandes l’air de rien.
Tu ne parles jamais de ta maladie. Certains disent que tu en ignores tout. Moi je crois que tu n’en parles pas par une sorte de pudeur bien à toi.
Je dis « oubli », mais il n’y a avec le nôtre qu’un lien d’analogie. A celui-là on ne reprend rien.
Oublieux, il t’a laissé l’anglais.
Tu allumes la télé. Tu ne veux pas manquer le discours du président. Tu penses à Chirac, ou peut-être déjà à Mitterrand.
Même les souvenirs d’enfance se diluent. Alors tu t’en fabriques. Tu n’as pas oublié qu’il faut bien dire quelque chose.
Souvent, tu t’arranges avec l’oubli. Alors, il te rend un frère. Il t’accorde aussi un bain de mer quotidien.
Stéphanie MOREL
Le petit rien
Un rendez-vous, dans l’ascenseur
A deux, à trois, un homme d’affaires
Un petit rien, les yeux turquoise
L’en verre en braille, escroc tout pâle
Il fait si tard, et les bécanes
Le long du soir, vrombissent crachin
Hommes à la pelle, les filles y pleurent
Dans les dortoirs, police crachoirs
La lune ramasse, les bouches qui passent
Dans les poubelles, les abattoirs
Ils ont trop bu, les sans trottoirs
La nuit des toits, les fers en l’air
Il est tout seul, le petit rien
Sa sale gueule, et les vautours
Et tous ces verres, d’heures dérivées
Il ne sait plus, l’amour est las
Pour tout ce soir, il en a une
Dans les mégots, hagarde sans nom
Lui donne son ventre, mais pas ses lèvres
Lui s’en fout juste, il veut qu’elle crie
Motel-fantôme, brouillard matin
Il est tout bleu, elle est partie
Pour d’autres rien, encore une fois
Il se la grille, la tête bitume
Aymeric LE GUILLOU
Le flacon bleu
Je ne sais pas
comment ma pensée
a réussi d’être comprimée
dans ce petit flacon
de couleur bleu
mais elle est là
et je la vois
qui me regarde
avec ces yeux
indécis
mais
plus noirs que la nuit
et plus tristes que la journée
qui s’endort
Sans savoir proprement
quoi en faire
je l’ai mis
le flacon
sur l’étagère du cellier
vis‐à‐vis du soupirail
et le soir
il se montre aux étoiles
qui en font
l’univers.
Silvana DUNAT